Du beurre maison

Depuis plusieurs mois, nous allons toutes les semaines chercher notre lait dans une ferme bio voisine. L’idée nous est venue de faire de la crème et du beurre (et puis du fromage aussi !). Quelques recherches sur internet nous ont bien aidé à comprendre le processus dans son entièreté, en particulier cette vidéo du ministère de l’agriculture, datant de 1930. Car sur internet on trouve beaucoup de vidéos pour faire son beurre, mais toujours à partir de crème du commerce.

Première étape, l’écrémage, il peut être manuel. Nous avons opté pour l’écrémeuse centrifuge, qui fait un bruit d’avion au démarrage, impressionnant, mais efficace !

Nous pasteurisons notre lait écrémé, pour en faire ensuite du yaourt.

La crème est aussi pasteurisée. Après, plusieurs méthodes semblent possibles, ensemencée avec des ferments, ou pas, le goût du beurre sera différent, il faudra que l’on teste.

Ecrémage du lait, à gauche la crème, à droite le lait écrémé

La crème doit avoir reposé plusieurs jours avant de devenir beurre, nos essais avec de la crème obtenue 12h avant n’ont pas été concluants.

On met la crème qui sort du réfrigérateur dans le robot (Kitchenaid vitesse 6), et on bat. On peut aussi le faire à la main ou dans une baratte. Il faut compter environ 7 à 15 mn au Kitchenaid.

La crème va devenir beurre…

La crème se transforme rapidement en Chantilly, on continue de battre et le processus commence. La Chantilly retombe…

La crème est au stade post-chantilly

Puis les grains de beurre s’amalgament, du liquide apparaît, le babeurre.  On continue encore un peu de battre, en réduisant la vitesse car si l’on bat encore trop le beurre va s’amalgamer davantage et l’étape suivante sera plus délicate à réaliser.

Grains de beurre et babeurre

Il faut retirer le babeurre et rincer les grains de beurre pour qu’ensuite celui-ci se conserve plus longtemps. Le babeurre s’appelle aussi « lait de baratte », « lait ribot » en Bretagne, et il est excellent à boire.

On filtre le babeurre

On rince les grains de beurre à l’eau froide jusqu’à ce que l’eau soit claire…

Rinçage des grains de beurre

Puis on malaxe un peu le beurre pour extraire l’eau et lui donner une belle texture.

Malaxage du beurre

Et enfin, on le moule et on le déguste !

Il est beaucoup plus blanc que le beurre du commerce, c’est du beurre d’hiver pauvre en carotène, mais surtout, sans colorants :smile1_tb:

Il est probable qu’il sera plus jaune ce printemps.

Beurre maison au lait de ferme bio

On peut aussi le saler (0,5 à 3% de sel). Maintenant, il nous faut expérimenter les différents types de fermentation de la crème pour en voir l’incidence sur le beurre.

Moutons, galons et lin

Toujours dans le tissage depuis la dernière fois. J’ai maintenant quelques torchons à mon actif. La grande question est : arriverais-je à m’en servir ?? (sous-entendu : oserais-je les user ?)

Juste après avoir expérimenté les motifs en laine sur le lin (cf billet précédent), j’ai tissé un torchon (ou napperon, ou ce qu’on voudra) en pur lin blanchi, dans les 8 ou 9 fils/cm je ne m’en souviens plus bien.

Torchon en lin

Un torchon en lin, sur le métier

Pendant ce temps-là, je rassemblais des matières premières en vue de tisser des moutons…

moutons tissé

Des moutons, torchon en coton

Malheureusement mon troupeau ne ressort pas beaucoup, le fil bleu que j’ai utilisé en trame est trop pâle. Pas grave, je vais en refaire avec du plus foncé.

En revanche mes cerises ressortent beaucoup mieux !

Cerises

Des cerises, torchon en coton

Techniquement, c’est du coton 8/2 et un enfilage type « été-hiver », de 9 fils au cm pour ces deux torchons à motif qui ont été fait sur la même chaîne. Les motifs sont en coton mercerisé « perlé 5 » de chez DMC, mis en double.

Les deux modèles viennent de chez Handwoven « top ten towels on eigh-shafts« , et cette technique de blocs en enfilage  « été-hiver » permet de réaliser toutes sortes de motifs différents. Évidemment, plus l’on a de cadres sur son métier (ici, 8), plus les motifs peuvent être complexes. D’où le fait que je rêve maintenant d’un métier de 16 cadres (ou plus, soyons fous, mais ça ne serait pas facile à manier). Si la technique vous intéresse, il y a un excellent article sur Weavezine ici (en anglais, of course).

Ensuite, j’ai eu une furieuse envie de réaliser un tapis pour mettre devant mon canapé.

Un tapis en mélange laine et poil de chèvre, chaîne coton.

Le tapis en action

Le tapis en action

Ça c’était un tissage facile et rapide. Densité de 3 fils/cm, chaîne en gros coton, trame en gros fil, mélange laine et poil de chèvre.

Et là maintenant, je suis dans le nid d’abeille…

Essuie-main en nid d'abeille

Essuie-main en nid d’abeille, coton 8/2

Modèle gratuit de chez Weaving Today ici. Coton 8/2 toujours, 9 fils au cm encore. Le rendu est gaufré, et cela devrait être accentué par le lavage.

J’ai pris goût pour les tissages fins, et les motifs ou frises qui peuvent orner un tissu m’attirent également beaucoup. Hélàs, il n’existe pratiquement aucune documentation en français sur les techniques de tissage « avancées », il faut, si l’on veut aller plus loin que la simple armure toile ou sergé, tisser en anglais. Du coup, mon vocabulaire français est assez pauvre et une fois encore, je remarque les lacunes de terme techniques par rapport à l’anglais. Quel dommage, d’autant que le tissage a fait longtemps partie de notre patrimoine domestique.

Dans un autre registre mais qui concerne toujours le tissage, les galons. Je suis tombée en amour des différentes techniques qui existent pour tisser des galons.

Deux galons

Galon du haut : technique « pebble weave » andine ; en bas technique « pick-up » scandinave et fil teint à la cochenille

Quand on pense tissage de galons, en français c’est forcément le tissage aux cartes (ou carton). En réalité, il existe différentes techniques, qui donnent des résultats différents. Par contre, la documentation est extrêmement rare. Melissende réalise de superbes galons dans différentes techniques, et à l’occasion elle chasse l’ouvrage rare (dois-je préciser que les ouvrages en question sont forcément en anglais ?) et m’en fait profiter (mais…. dois-je te dire merci Melissende ? :rolleyes_tb:).

Voici le petit dernier sur le métier, c’est Imelda, chez qui j’ai passé une semaine fabuleuse comme toujours, qui m’a inspirée. Le fil de motif est brillant, le fil de fond mat, et l’ensemble donne un aspect précieux au galon.

Galon fleur

Un galon précieux, technique scandinave

Il existe divers outils qui permettent de tisser des galons. Le métier à galon que je montre dans un précédent billet, le peigne en bois, pour ne citer que les plus courants, et cette très « box tape loom », réplique de métiers courants au XVIIIème siècle. Vous remarquerez les deux rangées de trous permettant la réalisation de galons type « pickup ». Merci à Bowmac à qui j’ai acheté cet métier, pour sa rapidité d’envoi et les informations qu’il m’a fournies.

Métier à galon du XVIIIè

Reproduction d’un métier à galon du XVIIIème siècle

Le prochain billet parlera sans doute de teintures végétales. Pour l’heure, je m’en vais voir ce que dit ma teinture à la gaude…

Couleurs de la nature

Mon été aura été placé sous le signe de la couleur et des casseroles.

Mon petit vélo spécialement équipé, m’a permis de faire rapidement les nombreux trajets entre l’atelier teinture, et la maison, séparés d’environ 200 m. Je ne me serais pas lancée dans les teintures végétales si je n’avais pas eu une pièce dédiée. La teinture végétale est salissante, encombrante, et l’on est amené à manier des substances, y-compris végétales, incompatibles avec l’alimentation.

Je « voyage » accompagnée de mes ouvrages de référence (ici, « Le Monde  des teintures naturelles » de Dominique Cardon, mon premier livre), dont le nombre grandit au fil des semaines.

Lorsque je teins, je ne cherche pas à obtenir une couleur particulière avec un végétal (ou animal, comme la cochenille), mais j’explore plutôt le potentiel tinctorial que pourra me procurer telle matière première.

J’ai ainsi exploré en partie la cochenille, je dis en partie parce qu’il me reste encore à obtenir des violets plus soutenus, et des orangés, peut-être encore d’autres nuances dont j’ignore encore l’existence aujourd’hui.

Toutes les couleurs ci-dessus ont été faites uniquement avec de la cochenille, Dactylopius coccus. C’est un insecte parasite des cactus.

La teinture à la cochenille est sensible au pH (potentiel hydrogène, c’est à dire l’acidité ou la basicité d’une solution acqueuse) du bain de teinture.

En fonction du pH, les couleurs obtenues diffèrent. Bain acide : couleurs rouge cramoisi à oranges. Bain basique : couleurs carmin à violettes. Le mordant utilisé, les sels métalliques comme l’alun, le sulfate de fer, de cuivre, les tanins ou l’acide oxalique, influe aussi sur la couleur, de même que l’absence de mordant, car certaines teintures n’ont pas besoin de mordant pour teindre la fibre.

Ci-dessus, de la cochenille sur écheveaux de pure laine. De droite à gauche : laine non-mordancée (rouge foncé), laine mordancée avec 10% d’alun et 6% de crème de tartre (cramoisi, pH plutôt acide), laine non-mordancée en pH légèrement basique (violet), laine non-mordancée avec  post-bain au sulfate de cuivre (parme), et enfin deuxième bain de teinture sur laine mordancée (rose clair).

A la fin de l’été, j’ai mis de côté tout le mohair que j’avais teint, pour l’exposer lors de la fête de la tonte chez Marylène.

La gamme chromatique n’est cependant pas complète, je l’agrandirait au fil du temps.

J’ai aussi beaucoup travaillé avec la garance. C’est une petite plante insignifiante, rampante, vivace. Quand on parle de couleurs végétales, c’est souvent à elle que l’on pense en premier. Célèbre pour son rouge, en particulier le rouge d’Andrinople, dont les Turcs ont eu le secret durant le Moyen-Âge. Ce sont les racines qui teignent en rouge.

Seulement, la garance se mérite. J’ai d’abord obtenu divers tons de rouge plus ou moins brique, plus ou moins soutenus en fonction de la température et concentration du bain, mais rien qui ne s’apparente de près ou de loin à du rouge :

Le challenge pour moi, a été d’obtenir du vrai rouge, vermillon, sans un poil de brun dedans. J’ai donc lu, testé, relu, retesté…

  • La garance ne donne un vrai rouge que si le bain de teinture n’est pas chauffé à plus de 60°C.
  • La garance ne donne un vrai rouge qu’en milieu calcaire.
  • La garance ne donne un vrai rouge que si l’on a pris soin d’ôter les colorants bruns indésirables des racines.
  • Il est conseillé de laisser les racines dans le bain de teinture pour obtenir du rouge.
  • Même s’il est possible de teindre sans mordancer la fibre, le vrai rouge n’est obtenu généralement qu’avec un mordançage.

Munie de tous ces renseignements, j’ai donc expérimenté.

  • Température de 60°C : les racines de la garance contiennent 19 principes colorants. Les colorants bruns se solubilisent à plus de 60°C. C’est pourquoi il ne faut pas faire trop chauffer son bain de teinture si l’on souhaite du rouge.
  • Le calcaire : évidemment, j’ai une eau très acide. Pour la rendre calcaire, j’ai pensé au plâtre, mais le résultat est médiocre. La craie n’a pas spécialement donné de bon résultats non plus. La chaux m’a donné d’excellents résultats mais fait feutrer ma laine ! Le tour de main fut de la doser subtilement.
  • Au bout de plusieurs essais, plus ou moins feutrés, j’ai pu m’approcher du rouge garance, mais il restait terne. J’ai donc ôté les colorants bruns qui ternissaient mon rouge, en mettant de l’eau bouillante sur mes racines réduites en poudre, attendu 30 secondes, filtré cette eau, recommencé encore une fois. Puis fait mon bain de teinture, avec la chaux et sans trop chauffer.

Et voilà !

Des couleurs plus inhabituelles pour la garance. Cette petite plante est incroyable ! Depuis la gauche, en haut, dans le sens des aiguilles d’une montre :

  • du rouge vermillon obtenu d’après tout ce que j’avais lu.
  • du rose, sur laine non-mordancée avec un post-bain alcalin
  • de l’aubergine, sur laine mordancée au sulfate de fer, et post-bain alcalin (c’est une couleur traditionnelle du moyen-orient)
  • un brun-roux, sur laine mordancée. J’ai fait bouillir mes racines de garance avec de l’acide oxalique.
  • du mandarine, sur laine non mordancée.

Il me reste à obtenir des bruns chauds, maintenant, et aussi, du rouge carmin, avec la garance. Je n’ai pas fini d’expérimenter…