Moudre sa farine

Un article dans la même veine que celui que j’avais déjà écrit sur l’écrémage du lait, la fabrication du beurre et de la crème : moudre sa farine.

Depuis que nous avons des poules, tous les ans à la période des moissons, nous achetons pour l’année du triticale bio à la ferme voisine (hybride de blé et de seigle). Cette année le temps a été particulièrement mauvais au printemps, le triticale n’a pas levé. La récolte du blé bio a été meilleure et c’est ce que nous avons pris pour nos poules.

En mettant notre précieux blé tout frais moissonné dans des tonneaux pour le conserver à l’abri des souris et de l’humidité, nous l’avons trouvé tellement beau que ça nous a donné envie de moudre notre farine… et puis on s’est dit que sur 300 kgs de graines, les poules ne verraient rien si on en prélevait un tout petit peu 😉

Pour moudre des céréales, il faut un moulin. Certains utilisent un moulin à café, mais nous avons voulu faire les choses bien et avons choisi un vrai moulin à céréales avec meule de pierre. Il en existe de nombreux modèles, pour tous les prix, mais cela reste un budget élevé (compter un minimum de 250 €). On trouve quelques modèles à manivelle, comme celui que nous avons choisi, mais la plupart sont électriques. Il semble qu’il y ait beaucoup de fabricants en Allemagne et Autriche. Nous avons choisi le « country » de Schnitzer. Si l’on veut obtenir de la farine blanche ou demi-complète, il faut aussi un tamis.

Moulin à farine avec meule de pierre, et tamis en arrière plan.

Notre blé étant bio, malgré qu’il ait déjà été trié il contient encore quelques graines indésirables que nous retirons avant de le moudre. Il faut aussi bien retirer les éventuels cailloux car la meule de pierre n’aime pas ça !

La farine est intégrale, il faudra ensuite la tamiser (blutage).

La farine qui sort du moulin est dite « intégrale » car elle est complète.

Farine intégrale

Certains utilisent la farine intégrale (T150) qui sort du moulin, sans la tamiser. Mais nous, nous préférons la farine blanche. Hé hé… là je sais que nous faisons partie de l’infime minorité de ceux qui font leur farine non pas pour l’aspect santé, mais pour l’aspect goût, qualité, désir de revenir aux sources et maîtrise de l’alimentation.

Je l’affirme haut et fort, et j’assume : je n’aime pas la farine complète ! Je trouve indigeste tout ce qui est à base de farine complète, sans parler du goût et de la texture.

Donc l’étape suivante est le blutage (ou tamisage) de la farine : on passe la farine à travers un tamis, pour retirer le son.

On passe la farine intégrale à travers un tamis, pour séparer le son.

Le son reste dans le tamis.

La farine demi-complète (type 90 environ).

Voilà, on obtient une farine demi-complète, le tamis utilisé est un Type 90 environ. Mais ça n’est pas assez pour faire de bonnes pâtisseries, le nec plus ultra c’est le Type 55…

Donc, on passe la farine demi-complète dans le tamis type 55 ; et là le tamisage est beaucoup plus fastidieux à réaliser que pour de la farine complète, et il y a davantage de pertes :

Semoule et farine dans le tamis Type 55, avec encore un peu de son.

Et le résultat :

Farine locale biologique Type 55 moulue à la main.

Quel bonheur de déguster des crêpes maisons réalisées avec de la farine locale fraîchement moulue, du lait local, et des œufs de nos poules (elles aussi nourries avec du blé local) !

On peut bien sûr moudre d’autres céréales, et c’est tout un monde à explorer et à goûter. En faisant des recherches sur la farine, j’ai appris bien des choses sur le blé, les variétés de blé et leurs usages en particulier, le taux de gluten et le type de farine, les minoteries et la farine de boulangerie. Que connais-t-on vraiment de la farine lorsqu’on achète un paquet en magasin ?

Et pourquoi pas tenter de cultiver du blé ? En tout cas une variété paysanne ou fermière comme le blé de notre paysan (la variété Pireneo), et non pas un blé hybride ou breveté de semencier…

Fabrique à chaussettes et laine à rayures automatiques

Le Père Noël m’a gâtée cette année. Cela faisait quelques années que j’avais envie d’avoir une machine à tricoter des chaussettes…

Machine à chaussette Legaré 400

Mais bon entre avoir envie et passer à l’acte d’achat, il y a un pas que je n’avais pas franchi jusqu’ici…

Machine à chaussette Legaré 400

Jusqu’à ce que Bibime me propose un troc que je n’ai pas su refuser :king_tb:

Ce type de machine circulaire a été beaucoup fabriqué début 1900, un peu partout dans le monde, en particulier aux US et Canada, mais aussi en Allemagne, Hollande et même France.

Aujourd’hui, il reste un fabricant néo-zélandais, AutoKnitter, et on trouve des machines d’occasion complètement restaurées, ainsi que des aiguilles de rechange et autres fournitures, chez AngoraValley par exemple.

L’apprentissage a été un peu laborieux, pourtant le tricot machine, je connaissais. Après des prises de tête et des tricotages/détricotages, je n’en suis pas à faire une paire de chaussette en 8 mn 30 s comme fiberjira, mais enfin quand tout va bien ça va assez vite.

Collection de chaussettes à la machine

Du coup, j’ai déterré une idée qui me trottait dans la tête depuis également quelques années : teindre du fil à chaussette pour qu’il forme des rayures.

Laine à rayures automatiques, teinte à la main avec les teintures Rit.

D’après le livre « Yarns To Dye For: Creating Self-Patterning Yarns For Knitting« , il faut pouvoir faire un écheveau suffisamment grand pour que les séquences de couleurs soient intéressantes. 12 m est une bonne longueur. Les écheveaux du commerce font entre 1 et 2 mètres de circonférence, il faut donc les remettre en écheveau. J’ai utilisé pour cela mon ourdissoir qui me sert en tissage, mais si l’on est courageux, on peut très bien faire un écheveau entre deux chaises.

Ensuite, vient le moment de teindre ce très long écheveau. J’ai utilisé des teintures Rit et fait 6 séquences de couleur de 2 m de long (et pour info si vous voulez reproduire ces couleurs, j’ai utilisé le jaune fluo, vert 32, rose 7, vert fluo, violet 13 et rose fluo).

Echeveau de 12 m de circonférence, avec 6 séquences de couleurs de 2 m

J’en ai profité pour tester la méthode de teinture au micro-onde, qui fonctionne très bien : 2 mn pleine puissance, 2 mn de repos, répéter encore 2 fois, puis laissez refroidir à température ambiante avant de rincer. Bien entendu, j’ai emballé chaque portion de couleur dans un film étirable, pour que les couleurs ne se mélangent pas.

Laine à rayures automatiques

Puis j’ai remis en écheveau dans une circonférence plus pratique, à l’aide du mandrin qui me sert en filage. Et voilà !

Pour un premier essai je suis plutôt contente, et ça me donne envie de recommencer, bien que le processus est assez long finalement.

L’avantage de la machine à chaussette est que le résultat ne se fait pas trop attendre, j’ai tricoté les deux chaussettes dans la foulée et voici comment elles se présentent une fois sorties de la machine :

Les chaussettes toutes chaudes sorties de la machine

Ensuite il me faut les séparer et faire une couture en grafting pour le bout du pied.

Et finalement, du tissage

Bon c’est pas le tout de parler poulettes et de jouer à l’apprentie fermière, j’ai quand même tissé un peu ces derniers mois…  :rolleyes_tb:

D’abord, à cause de Laurence des laines Zinzin, qui en quelques mots bien choisis a su titiller ma fibre curieuse, j’ai adopté un troisième métier à tisser, un Piccolo de chez Saori :

Métier à tisser Piccolo de Saori

C’est un métier japonais, il est tout petit mais fait tout comme un grand. Il se plie, est tout léger, prend peu de place et est très simple d’utilisation, d’autant qu’il existe des chaînes pré-ourdies qu’il n’y a plus qu’à installer sur le métier pour s’en servir, gain de temps, et quand on sait que l’ourdissage est le plus délicat dans le tissage, c’est la réussite assurée !

Il possède deux cadres et ce que je trouve vraiment pratique, c’est qu’il a des pédales, le tissage se fait facilement et confortablement (quand on a goûté aux pédales qui lèvent les cadres, on trouve plus fastidieux de le faire à la main, même avec deux cadres). C’est un vrai métier à tisser, il a des lisses et un peigne en acier comme ses grands frères. Bref, un petit métier qu’on peut emporter partout, et idéal pour tisser les fils faits-mains.

Les couleurs de Léo

J’ai commencé par tisser un fil mohair, qu’une amie, Léo, m’avait offert lorsque l’on s’est rencontrées au printemps dernier. Léo est une magicienne des couleurs végétales, elle pratique la teinture par fermentation et obtient des couleurs époustouflantes. Ici vous pouvez voir les couleurs qu’elle a obtenue avec du sureau yèble, oui oui toutes ces nuances sont obtenues avec une seule plante, quand je vous dis que c’est une magicienne ! C’est le mohair de ses biquettes, que j’ai filé un peu fantaisie et retordu avec une soie très fine. Seul un tissage tout simple pouvait rendre la beauté de la matière et des couleurs.

Et voici le résultat.

Mohair de Léo tissée

Sur ma lancée j’ai continué à tisser quelques petites écharpes en laine fantaisie. Dont celle-ci, la laine de couleur est filée main, j’avais fait de très forts « zigouigouis » et l’armure toile une fois encore, met très bien en relief cet aspect. J’ai alterné avec un fil de coton noir tout sage, et cela me titillait depuis un moment d’intégrer des grelots directement dans ma trame de tissage, voilà c’est fait ! C’est donc une écharpe tintinabulante… :tongue1_tb:

Echarpe arc-en-ciel et grelots

J’ai également tissé deux étoles pour une amie, Ygaëlle, avec sa laine filée main. Elle a réalisé un magnifique dégradé dans son fil.

Etoles pour Ygaëlle

Le dernier tissage en date sur mon petit Saori, est un essai de tissage dit « à effet de trame », c’est à dire où l’on ne voit pas du tout la chaîne. Cela permet d’obtenir des motifs avec seulement deux cadres (ou un métier à peigne envergeur). Le plus difficile dans ce type de tissage, est de trouver le bon rapport entre la grosseur du fil de chaîne, de la trame et l’écartement des fils. Voici la recette pour ce tissage : du coton pour chaîne fin, de la soie 20/2 et 4 fils au cm. Il faut bien passer le fil en biais dans la foule, et peut-être, avec un métier à peigne envergeur, tasser le travail avec un peigne.

Tissage à effet de trame

La réalisation est assez longue, mais le résultat est magnifique avec de la soie. Je pourrais aussi utiliser du coton ou de la laine, le résultat serait différent, encore des tests à réaliser…

Effet de trame, détail

N’ayant d’abord qu’un peigne de 5 fils/cm sur mon Saori, je n’ai pas pu obtenir l’effet de trame désiré. En attendant de faire des essais avec 4 fils/cm, je me suis amusée à tester le leno. C’est une technique où l’on manipule les fils de chaîne pour créer des jours dans le tissage. Ici en chaîne, le coton fin, et en trame de la soie tussah 8/2 qui rend vraiment bien avec le coton.

A nouveau ce que l’on peut réaliser sur un métier Saori, on peut le réaliser avec un métier à peigne envergeur comme le Harp.

Leno, détail

J’ai aussi réalisé d’autres tissages sur mon grand métier à tisser, j’en parlerai dans un prochain billet !