La gaude, de son petit nom botanique reseda luteola, et qu’on appelle aussi réséda du teinturier, est une plante tinctoriale riche en flavonoïdes, une matière colorante de couleur jaune. Contrairement aux idées reçues, les plantes tinctoriales les plus connues en France poussent très bien au nord de la France, c’est le cas de la gaude, du pastel et de la garance (il y a d’ailleurs un important producteur de garance en Hollande).
C’est Soleil qui m’a fourni des graines de gaude il y a quelques années, graines que j’avais consciencieusement semées dans de petits pots, en vue de les replanter là où je l’avais décidé… sauf que la gaude est une plante assez capricieuse qui pousse là où elle a envie de pousser, et de préférence dans des endroits impossibles : contre un mur plein sud sans terre, entre des pavés, forcément avec très peu de terre… Mais jamais dans le jardin. Et puis avec sa racine pivot, elle est assez difficile à repiquer de toute façon.
Depuis que j’ai semé des graines, chaque année je découvre des pieds de gaude dans des endroits inattendus de mon jardin, pour mon plus grand plaisir. La gaude est une plante bisanuelle, la première année elle forme une petite rosette, la deuxième année elle monte assez haut (1,50 m est courant chez moi) et se couvre de minuscules fleurs jaunâtres. Chez moi, elle n’a aucun entretien et elle fait sa vie toute seule comme une grande. Elle aime je pense, les endroits ensoleillés et secs. Originaire du bassin méditerranéen, elle s’est parfois, mais rarement, naturalisée au nord de la Seine. Des botanistes m’ont dit en avoir vu des pieds au bord de l’autoroute A4 entre Metz et Paris.
Toute la plante contient du lutéolol, et la couleur lumineuse que l’on obtient est l’une des plus solides à la lumière et aux lavages, parmi les teintures végétales jaunes. Un mordançage préalable est nécessaire cependant.
Cette année, vers le mois de juin, j’ai coupé un pied de gaude qui poussait dans un lieu de passage. Je l’ai découpé en tronçons, mis dans une grande casserole remplie d’eau, avec de la laine que j’avais mordancée il y a une année, posé un couvercle dessus… et oublié tout ce petit monde pendant au moins trois semaines (je teins et mordance de plus en plus à froid, en laissant la fibre longtemps dans le bain de teinture). Il faisait chaud dans mon local à teinture, probablement plus de 23°C, et le processus de fermentation s’est amorcé…
Quelle surprise lorsque j’ai retiré mes écheveaux du bain de teinture, et que j’ai découvert un beau vert tendre sur celui mordancé à l’alun ! Habituellement on obtient ce type de vert (un peu plus terne cependant) avec un post-bain au sulfate de cuivre.
Je suppose que je serais incapable de reproduire cette couleur une prochaine fois. C’est tout le charme de la teinture végétale, et c’est d’autant plus gratifiant quand la plante a poussé chez soi !