Modèle « Reindeer » d’Alan Dart, entièrement en laine filée main (le corps est en mouton de race « roux ardennais »).
Je vous souhaite à tous un bon réveillon et un Joyeux Noël !
Encore une longue absence, mais pour une bonne raison (comme toujours… )
Voilà déjà quelques temps que Cher&tendre et moi avions en projet de remanier et refaire complètement notre séjour-salle à manger, et l’idée de construire notre propre moyen de chauffage a fait son petit chemin aussi…
C’est ainsi que, mûs par un instinct de conservation probablement, nous nous sommes empressés de nous mettre à l’œuvre à la fin de l’été, laissant tomber tous nos autres gros projets en cours, pour nous consacrer à la construction d’un poêle à bois de masse, de type « rocket stove », et accessoirement pour refaire complètement à neuf notre salon. Chez nous, refaire le salon, cela veut dire construire les meubles qui vont avec.
Mais qu’est-ce que c’est qu’un poêle de masse ? Wikipédia le dit mieux que moi :
Un poêle de masse ou poêle à accumulation est un appareil de chauffage qui compte sur des matériaux lourds (pierre, brique, béton) pour accumuler l’énergie d’une flambée rapide et intense (environ 2 h) et restituer longuement la chaleur une fois le feu éteint (jusqu’à plus de 24 h).
La diffusion de chaleur se fait notamment par rayonnement infrarouge. Les poêles à accumulation disposent également d’un circuit d’échange (canaux ou chicanes) permettant de récupérer la chaleur des fumées avant leur évacuation par le conduit.
Une autre particularité de cette technique est la combustion à très haut rendement réel (entre 80 et 87 % du PCI – pouvoir calorifique inférieur du bois), ou post-combustion, réduisant les émissions de monoxyde de carbone, particules fines et autres polluants habituellement générés par la combustion au bois.
Cher&tendre, chargé de mission pour la construction dudit poêle de masse, a opté pour une variante, le « rocket stove ». Là encore, Wikipédia vous dira mieux que moi ce que c’est :
Le Rocket stove ou poêle Rocket (fusée) est un type de poêle de masse appelé ainsi à cause du son qu’il produit en fonctionnement, semblable à celui d’un tuyère de fusée.
C’est un foyer semi-ouvert composé :
* d’un orifice d’alimentation permettant l’arrivée d’air et la mise en place du combustible ;
* d’une chambre de combustion ;
* d’une cheminée d’évacuation isolée.C’est cette isolation qui est responsable de l’excellent tirage produisant le son caractéristique.
Nous avons opté pour construire un Rocket stove parce qu’il semblait plus accessible à des novices en poêle de masse ET en maçonnerie. Et sa simplicité en même temps que son efficacité, nous attirait. Nous avons utilisé plus de 500 briques, pour un poids total d’environ 1,5 tonnes, ce qui classe notre poêle de masse dans la catégorie des « petits » (certains poêles peuvent peser jusqu’à 3 tonnes, voire davantage).
Nous avons équipé notre poêle d’une banquette chauffante, l’évacuation des fumées passant dessous avant d’aller dans la cheminée.
Allez zou, les photos !
Le début des travaux, avec la double-cheminée au milieu, le foyer à droite (le chargement du poêle se fait dans l’autre pièce, nous avons ouvert la paroi. Ainsi, le séjour reste sain et exempt de toutes ces fines poussières de cendre qui salissent tout et qui bouchent les bronches).
L’enceinte visible, de couleur ocre, avec la « cheminée à double-enceinte » et en bas la sortie des fumées.
La sortie des fumées ; avant d’entrer dans la cheminée, les fumées vont se promener sous une banquette et sortir par l’orifice prévu sur la gauche.
La future banquette et le tuyau des fumées qui circule dessous avant d’aller dans la cheminée :
Et voici le poêle terminé :
L’expérience fut intéressante mais éprouvante (nous n’avons pas pris de congés pour rénover notre séjour). Il n’est pas si difficile de concevoir un poêle de masse, et qui fonctionne, bien que notre poêle soit perfectible (le prochain sera encore mieux).
Nous faisons 1 à 2 feux par jour, selon la température extérieure. Nous brûlons beaucoup moins de bois qu’avant, et nous avons beaucoup plus chaud.
La chaleur est douce, pas de sensation de chaud-froid ni de courant d’air. Le poêle est moins contraignant à l’usage qu’un poêle classique, une fois le feu terminé, il n’y a plus à se soucier de rien. Par contre, il y a un effet « retard » entre le moment où l’on fait un feu, et le moment où le poêle commence à rendre la chaleur : environ 3 heures pour le nôtre. Plus le poêle est « de masse », et plus grand est cet effet retard.
La banquette chauffante est un vrai délice pour tricoteuse…
Maintenant qu’on a découvert les joies du Rocket stove, impossible de revenir à un poêle à bois classique, cher, peu efficient, salissant.
Vue d’ensemble de notre séjour complètement refait de nos petites mains :
A part ça, un peu de tricot, un peu de filage.
Des moufles, modèle « Hippocampus » sur Ravelry (existe en français) :
Laine cardée et filée main, mélange de mérinos et d’algues. J’ai fait un retors navajo pour conserver l’alternance des couleurs créée au cardage.
Et puis une autre paire de moufles issues de l’ouvrage « Selbuvotter » :
Laine « industrielle », mais teinture rouge à la cochenille.
Mon été aura été placé sous le signe de la couleur et des casseroles.
Mon petit vélo spécialement équipé, m’a permis de faire rapidement les nombreux trajets entre l’atelier teinture, et la maison, séparés d’environ 200 m. Je ne me serais pas lancée dans les teintures végétales si je n’avais pas eu une pièce dédiée. La teinture végétale est salissante, encombrante, et l’on est amené à manier des substances, y-compris végétales, incompatibles avec l’alimentation.
Je « voyage » accompagnée de mes ouvrages de référence (ici, « Le Monde des teintures naturelles » de Dominique Cardon, mon premier livre), dont le nombre grandit au fil des semaines.
Lorsque je teins, je ne cherche pas à obtenir une couleur particulière avec un végétal (ou animal, comme la cochenille), mais j’explore plutôt le potentiel tinctorial que pourra me procurer telle matière première.
J’ai ainsi exploré en partie la cochenille, je dis en partie parce qu’il me reste encore à obtenir des violets plus soutenus, et des orangés, peut-être encore d’autres nuances dont j’ignore encore l’existence aujourd’hui.
Toutes les couleurs ci-dessus ont été faites uniquement avec de la cochenille, Dactylopius coccus. C’est un insecte parasite des cactus.
La teinture à la cochenille est sensible au pH (potentiel hydrogène, c’est à dire l’acidité ou la basicité d’une solution acqueuse) du bain de teinture.
En fonction du pH, les couleurs obtenues diffèrent. Bain acide : couleurs rouge cramoisi à oranges. Bain basique : couleurs carmin à violettes. Le mordant utilisé, les sels métalliques comme l’alun, le sulfate de fer, de cuivre, les tanins ou l’acide oxalique, influe aussi sur la couleur, de même que l’absence de mordant, car certaines teintures n’ont pas besoin de mordant pour teindre la fibre.
Ci-dessus, de la cochenille sur écheveaux de pure laine. De droite à gauche : laine non-mordancée (rouge foncé), laine mordancée avec 10% d’alun et 6% de crème de tartre (cramoisi, pH plutôt acide), laine non-mordancée en pH légèrement basique (violet), laine non-mordancée avec post-bain au sulfate de cuivre (parme), et enfin deuxième bain de teinture sur laine mordancée (rose clair).
A la fin de l’été, j’ai mis de côté tout le mohair que j’avais teint, pour l’exposer lors de la fête de la tonte chez Marylène.
La gamme chromatique n’est cependant pas complète, je l’agrandirait au fil du temps.
J’ai aussi beaucoup travaillé avec la garance. C’est une petite plante insignifiante, rampante, vivace. Quand on parle de couleurs végétales, c’est souvent à elle que l’on pense en premier. Célèbre pour son rouge, en particulier le rouge d’Andrinople, dont les Turcs ont eu le secret durant le Moyen-Âge. Ce sont les racines qui teignent en rouge.
Seulement, la garance se mérite. J’ai d’abord obtenu divers tons de rouge plus ou moins brique, plus ou moins soutenus en fonction de la température et concentration du bain, mais rien qui ne s’apparente de près ou de loin à du rouge :
Le challenge pour moi, a été d’obtenir du vrai rouge, vermillon, sans un poil de brun dedans. J’ai donc lu, testé, relu, retesté…
Munie de tous ces renseignements, j’ai donc expérimenté.
Et voilà !
Des couleurs plus inhabituelles pour la garance. Cette petite plante est incroyable ! Depuis la gauche, en haut, dans le sens des aiguilles d’une montre :
Il me reste à obtenir des bruns chauds, maintenant, et aussi, du rouge carmin, avec la garance. Je n’ai pas fini d’expérimenter…