Remonter le temps

Le week-end dernier avait lieu à Marles (02) le « Festival d’Histoires vivante« , une reconstitution historique qui couvrait la période de l’antiquité jusqu’à l’an Mil. J’ai pris goût à fréquenter ces manifestations, où l’on rencontre des gens passionnés qui consacrent tout leur temps libre à reconstituer une période de l’histoire, et à reproduire le mode de vie de cette époque. Ces passionnés sont regroupés en associations, parfois des historiens et archéologues en font partie. Avec les toutes dernières découvertes archéologiques, ces « troupes » tentent donc de reconstituer notre mode de vie d’il y a plus de mille ans.

Bien sûr, les guerriers romains ne m’intéressent guère (après tout, je suis une fille :happy_tb:), par contre toute la partie artisanale en général, et textile en particulier, m’attire, et je prends plaisir à discuter avec les participants, avec qui finalement, j’ai beaucoup d’affinités dans mon mode de vie et mes loisirs.

Des maisons mérovigiennes superbes :

Une centurie romaine, le nombre de participants était impressionnant :

Cette romaine (je suppose, car elle était juste à côté d’une troupe de romains) m’explique la technique du tissage aux tablettes, appelé aussi tissage aux cartons :

Le tissage aux tablettes est une technique très ancienne, qui permet de tisser des bandes très solides, où l’on ne voit pas du tout le fil de trame, prisonnier dans la chaîne. Mais il est difficile de tisser de cette manière, car il faut retenir les séquences de rotation de chaque tablette (cartons), ces fils qui forment la chaîne donc. La dame m’expliquait qu’à l’antiquité, le tissage aux tablettes était bien souvent le point de départ d’un tissage sur métier à pesons (ancêtre de nos actuels métiers à tisser) : il suffisait de laisser courir des fils de trame d’un côté de la bande. Ces fils de trame deviennent ensuite la chaîne du futur tissage.

Là, j’étais chez les vicking, et une charmante vicking m’a expliqué le fonctionnement de son métier à pesons (visez les magnifiques décorations vickings qui soutiennent les barres de lisses) :


Et justement, elle me disait qu’elle avait débuté son tissage par une bande faite aux tablettes. Techniquement, le métier en photo correspond à un actuel métier à 4 cadres.

Et voici un exemple de tissage sur métier à pesons, avec départ (en haut de la pièce de tissus) de tissage aux cartons :

L’armure du tissu est un sergé.

En dehors des tissages et des romains, il y avait beaucoup d’étals d’artisans (travail du cuir, du verre, poterie, métal, bijoux…), je me suis donc mise en quête d’un fuseau antique… :tongue1_tb:

Et j’ai trouvé Lud’os et son étal. Lud’os est un tablettier, cela veut dire qu’il travaille l’os, qui est un matériau aussi dur que le marbre.

Et voici le fuseau que j’ai rapporté, fabriqué par Lud’os :

C’est la réplique d’un fuseau qui est exposé au musée de Nîmes, et qui daterait du 4ème siècle. Il est en os, et la fusaïole (la partie ronde et renflée) est en buis. Le fuseau est tout petit, il mesure 15 cm et pèse 15 grammes (il semble que les fuseaux antiques étaient très légers). Lud’os l’a façonné avec un archet, c’est à dire un tour à métaux à main.

J’ai pris beaucoup de plaisir à utiliser ce superbe objet, j’ai pu faire un fil fin assez facilement, bien que le fuseau n’ai pas autant d’inertie qu’un fuseau plus moderne :

La laine est d’une race de mouton inconnue, lavée et cardée par mes soins.

Et puis, toujours dans l’histoire, mais une histoire plus récente, le week-end qui vient, soit le 5 et 6 juillet prochain, aura lieu à Oricourt (70) les Journées médiévales. Cette fois je n’y serais pas en visiteur, mais en participante, avec mon rouet, et habillée d’une tenue médiévale que Cher&tendre m’a cousu. Détail de la couture de ce vêtement la prochaine fois :wink1_tb: Si vous habitez dans le secteur, n’hésitez pas à passer !

Bon et bien avec tout ça le tricot est carrément mis de côté ou avance à pas de fourmis…

Par contre, le Père-Noël de la « mi-année » (ben voui, du 25 juin quoi :tongue1_tb:) est passé il y a quelques jours pour m’apporter ça :

C’est un métier à tisser de 90 cm de large, 8 cadres et 10 pédales. De la folie à l’état pur. :jittery_tb:

Il a fallu faire de la place dans le bureau-atelier pour le caser (l’occasion aussi de faire un peu de rangement, hem hem…).

Et puis voici mon premier projet en « Bambou » de chez Fonty :

Ce sera probablement une écharpe, et j’ai eu le coup de coeur pour ce motif qui me rappelle un peu le triskell celte même si mes spirales ont 4 jambes au lieu de 3. Le motif est assez simple mais se fait sur 8 cadres. Je me régale :wub_tb:

Microscopie

Que se cache-t-il derrière nos matières premières préférées ? Pourquoi la laine feutre, pourquoi elle peut parfois piquer, quelle est la différence entre de l’alpaga, de la laine et du coton ?

Je vous invite à faire avec moi un plongeon au coeur des fibres, à l’aide de mon nouveau joujou : un microscope équipé d’un appareil photo.

Suivez-moi… :arrow:

Un brin de laine en éclairage épiscopique (par le dessus), grossissement 100 fois :

Voici de la laine, race Limousine, grossissement 100 fois. Le gros poil sur la photo, c’est du jarre.

Le jarre est un poil épais, creux, qui ne prends pas la teinture, et qui fait que la laine ou le mohair, pique. Quand on sait que la finesse d’une fibre détermine sa douceur, on comprends mieux pourquoi le jarre pose problème. Il est donc important de l’éliminer pour obtenir une matière première de qualité.

Un poil de mouton race limousine, grossie 800 fois :

On voit nettement les écailles de la laine, ce sont les écailles, qui en s’ouvrant sous l’action conjuguée des frottements, de tensio-actifs (savon, liquide vaisselle, etc…) et des chocs thermiques, créent le phénomène du feutrage. La limousine est réputée pour feutrer facilement, elle n’est d’ailleurs pas très douce et s’utilise précisément pour faire du feutre.

Un autre poil de mouton, cette fois-ci de race Babydoll, grossissement 400 fois :

Les écailles sont moins nombreuses que pour la limousine.

Du coton, grossissement 400 fois :

Aucunes écailles, le coton ne feutre pas. Mais une forme renflée sur les bords et applatie au centre.

De l’alpaga grossissement 400 fois.

Les écailles sont moins prononcées que pour la laine, ce poil d’alpaga est assez fin.

Les fibres d’origine synthétiques sont assez passionnantes à observer, ici des fibres d’angelina grossies 400 fois :

Ce sont des fibres très brillantes, aux reflets irisés ou holographiques. On en met très peu dans un fil pour lui donner une note scintillante. La fibre n’est pas fine, et elle est très plate.

Quand on l’éclaire par le dessus (éclairage épiscopique), elle brille de mille feux, on dirait la photo satellite d’une ville éclairée de nuit :

Il me reste encore des tas de fibres à observer, du lin, du chanvre, du kapok, diverses races de laine et d’autres sortes de bêtes à poils comme le chameau, le yak… l’observation au microscope est fascinante, c’est la re-découverte du monde de tous les jours qui nous entoure.

Côté tissage, j’ai terminé une étole en coton et soie :

Et Central Park Hoodie est photographié sur pieds dans la galerie de Tricofolk ici et .