Une petite nouvelle à l’atelier

Une nouvelle venue à l’atelier : une machine à tricoter circulaire « La Gauloise éclair » de 96 aiguilles, datant des années 1910. La marque est française mais la machine a probablement été fabriquée en Angleterre par Harrisson pour le marché français. Elle ressemble aussi très fort à la Wikuna hollandaise.

Machine à tricoter circulaire « La Gauloise »

Et voilà, pratiquement 110 ans après, la machine fonctionne toujours aussi bien, j’ai pu faire une chaussette tout en côtes, la suivante arrive.

Arrivée partiellement démontée dans sa caisse en bois d’origine, la machine après un bon nettoyage et dégrippage est complète et parfaitement fonctionnelle. Comme d’habitude, il faut commencer par mettre des aiguilles neuves, mais je finis par connaître fournisseur, modèle à choisir et jauge 🙂

Machine à tricoter circulaire « La Gauloise »

La machine est équipée d’une sonnerie « sans rival » qui permet de détecter un nœud dans le fil ; le fil est guidé dans un œillet puis passe à travers une petite languette qui ne demande qu’à heurter la sonnette à la moindre résistance : il fallait y penser. Le système était breveté. J’adore cette petite sonnette, je n’en avais jamais vu ou entendu parler jusqu’ici.

Le cylindre de 96 aiguilles et le plateau de 48 est un peu intimidant au départ (bien que la Semeuse Jacquard que je possède a un cylindre de 130 aiguilles et je m’y fait petit à petit), mais cette machine fonctionne vraiment très bien, elle est fluide et tricoter des chaussettes tout en côtes est un vrai régal une fois qu’on a trouvé la laine qui va bien (en l’occurrence, la Zephir de Fonty est parfaite).

Chaussette en cours de réalisation

Avec la machine il y avait un catalogue des établissements Amineau, j’estime la date aux environs de 1930 donc postérieur à la machine (peut-être que le / la propriétaire rêvait d’une autre tricoteuse, linéaire ou plus performante ?). Et oh joie, il y a également des indications sur la façon de procéder à l’époque pour l’achat puis ensuite la fabrication des chaussettes en vue de les vendre. Un document à mes yeux inestimable donc. Je l’ai scanné, et le voici !

Catalogue Amineau

Une autre pépite venue avec la machine : le mode d’emploi d’époque. En très mauvais état hélàs, mais qui donc bouffe le papier comme ça :furious_tb: Des souris ? En tout cas, en exclusivité mondiale, voici un mode d’emploi pour machine à tricoter circulaire en français ! :king_tb:

Mode d’emploi La Gauloise

Je rigole, mais n’empêche que je n’en ai jamais trouvé aucun sur le net en français (ou alors il faut payer). Dans ce mode d’emploi il y a une explication pour tricoter la pointe des chaussettes « à la française » que je n’avais jamais vu ailleurs.

Je renouvelle ma demande de collecte d’informations ayant trait aux machines à tricoter circulaires : tout ce que vous pourrez me dire ou me fournir m’intéresse au plus haut point.

Conserver le dégradé d’un fil dans un tissage

On a parfois envie de tisser de jolis écheveaux teints en dégradé comme celui-ci par exemple :

Fil « Turin » en laine, soie et ramie.

Mais si on le tisse sans prendre de précautions particulière, on perd cet effet dégradé. Dans Handwoven septembre/octobre 2010, il y a un article qui explique comment conserver le dégradé d’un écheveau teint à la main. C’est exactement le même principe qu’expliqué sur Weavezine.

Le principe consiste à mesure la circonférence de l’écheveau, et d’ourdir en circulaire (c’est à dire sans faire d’allers-retours) un multiple de cette circonférence. Par exemple, mon écheveau ci-dessus mesure environ 140 cm, ce qui est trop court pour une écharpe. J’ai donc préparé une chaîne d’environ 2,80 m (deux fois la circonférence de l’écheveau). J’ai fais un encroix, mais j’aurais pu m’en passer pour un fil de cette épaisseur.

Ourdissage

En chaîne, fil « Turin« , poids fil à chaussette, dans les tons vert et bleu, et du Turin noir pour faire ressortir les couleurs. Tissé à 5 fils au cm sur le métier à tisser Cricket.

Echarpe en dégradé sur le cricket

En trame j’ai opté pour de la laine zéphir noire, en faisant attention à ne pas tasser trop fort, pour conserver les 5 fils au cm. Le résultat est une jolie écharpe bien souple.

Echarpe avec fil de chaîne dégradé

Cela me donne envie d’essayer la même chose sur un métier à galon !

Effets de chaîne en tissage

Cela fait quelques années que je croise régulièrement les magnifiques créations de Juanita Girardin. J’aime les effets de motifs en longueur dans l’écharpe, plutôt qu’en largeur. Et j’aime aussi la façon dont les couleurs ressortent. Alors j’ai décidé d’essayer de réaliser de tels tissages. Mes recherches m’ont amenées chez « Gangewifre Weaving » qui a eu la même démarche que moi pour tenter de recréer une écharpe style Juanita Girardin 🙂 Ses publications, le bref pour son écharpe, ainsi que cet article sur un autre blog, m’ont bien aidé à comprendre le principe.

Et le mieux pour valider l’idée, c’est encore d’échantillonner, même si c’est souvent fastidieux, je n’avais pas trop le choix quand même….

Echantillons de tissage avec fils de chaîne supplémentaires

A droite, du coton 20/2 mis en double pour le fond, et en quadruple pour les fils de motifs, avec 10 fils au cm si ma mémoire est bonne. A gauche, du coton 20/2 en simple pour le fond, et en double pour les motifs, tissé à 12 fils au cm. J’aime mieux le rendu. J’ai volontairement opté pour une densité un peu lâche pour que l’écharpe conserve sa souplesse. Nous étions en janvier, je venais de faire une belle grande randonnée en forêt, les couleurs de l’hiver m’ont inspiré ma première réalisation.

Les couleurs de la forêt en hiver

Techniquement, il s’agit de « ceinture de moine tournée » (« turned monk’s belt » en anglais). J’ai utilisé 8 cadres, 2 cadres pour l’armure toile de fond, que j’ai enlissé sur les cadres 7 et 8. Et 6 cadres pour les motifs. Il vaut mieux utiliser un métier à manette car il y a plus de 8 combinaisons de cadres différentes tout au long de l’écharpe.

Les fils de motifs viennent en plus de l’armure toile, la densité de 12 fils ne concerne donc que les fils du fond. En réalité j’ai le double de densité au niveau des motifs. Donc, ça fait parfois un certain nombre de fils à passer à travers le peigne.

Le mieux c’est d’avoir une deuxième ensouple qui ne reçoit que les fils de motifs, car ceux-ci peuvent avoir une tension différente de la toile puisqu’ils travaillent moins souvent. Néanmoins je n’avais pas de deuxième ensouple donc j’ai plié tout ce petit monde ensemble, et pour une seule écharpe d’environ 1,8 m terminée, cela s’est bien passé.

Echarpe « forêt d’Argonne en hiver »

Pour la deuxième écharpe j’ai complexifié un peu le tissage et fait un mix entre de l' »overshot tourné » (« turned overhsot » en anglais) et ma ceinture de moine. Pour l’overshot en fil de chaîne, il faut 6 cadres, là où seulement 4 suffisent pour l’overshot classique. Toujours nos deux cadres pour la toile (ce qui correspond au fil de liaison en trame dans le cas d’un overshot classique), et 4 pour le motif. Il me reste 2 cadres disponibles pour deux blocs de ceinture de moine.

Ciel étoilé

Et toujours du coton 20/2 à 12 fils au cm et fil supplémentaire mis en double. Pour ajouter un peu d’effets de couleurs, j’ai doublé mes fils avec chaque fois deux couleurs différentes. Ça ne se voit pas sur la photo…

Echarpe « ciel étoilé »

Un bref peut être plus parlant que des explications écrites, alors voici une portion de mon écharpe, avec l’overshot et la ceinture de moine.

Bref pour l’overshot et la ceinture de moine en chaîne